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Lettre ouverte aux impuissants

Chers collègues du Conseil d’Administration, chers camarades du Comité d’action. Il faut rendre hommage à votre dévouement dans la lutte passive que vous menez pour que notre université obtienne les moyens de fonctionner ; malheureusement, cela ne sert à rien. Ce n’est pas de suivre à la lettre les instructions ministérielles pour les premiers ou de gesticuler autour d’une table pour les seconds qui feront plier le ministère. Je crois qu’il est temps qu’une bonne âme vous explique le fonctionnement de notre société.

Il est aujourd’hui admis que l’Ecole n’a pas et n’a jamais eu les vertus qu’on lui prête. Lutter contre l'obscurantisme, instruire la jeunesse... qui croit encore à ces fadaises. L’Ecole sert tout simplement à péréniser la société inégalitaire dans laquelle nous évoluons. C’est un système de sélections des individus selon l’origine sociale et qui nous forme en fonction de la place que nous allons occuper dans la société. Bien sûr, ce n’est pas fait ouvertement ; il n’y a pas un censeur qui attend chacun d’entre nous au détour d’un couloir en disant «Oh là, le fils de prolo, va en BEP ; c’est suffisant pour le boulot auquel on te destine». Non ! c’est plus subtile. Cela s’appelle la sélection par le mérite. Evidement, il y a ceux qui ont plus de mérite que d’autres parce que leurs parents peuvent leur payer des études de qualité, parce que leur entourage leur permet de développer une culture générale, etc... Ce n’est pas de notre faute si les pauvres sont plus nuls que les riches !
La révolution scientifique et technique de l’après guerre a nécessité d’avantage de personnel qualifié. Il a donc fallu ouvrir l’enseignement supérieur au plus grand nombre pour combler les carences en cadres. On se souvient tous de J.P.Chevenement voulant amener 80% d’une classe d’âge au bac. Et non, cette décision ne reposait pas sur un grand principe humaniste mais était tout simplement commandée par la conjoncture économique. C’est cette nécessité qui a conduit à la réforme de l’enseignement supérieur dans les années 70 (réforme qui se poursuit aujourd’hui). Trois types d’universités sont mis en place. Les universités de masse ouvertes au tout venant étudiant et axées sur des filières professionalisantes (IUT, IUP...), les universités «moyennes» et les universités destinées à l’élite, pratiquant la sélection et bénéficiant des mânes du gouvernement. Bien sûr, là encore ce n’est pas fait ouvertement ; si une université reçoit moins que les autres, on explique ça par la conjoncture ; on assure qu’à l’avenir des efforts seront faits. Mais les années passent et la situation reste la même (vous voyez à quoi je fais référence).
Et bien Messieurs, j’ai le regret de vous dire que nous ne sommes ni une université d’élite, ni une université «moyenne». Banlieue défavorisée, étudiants issus de milieu modeste... et vous pensez que le ministère débloquera des fonds ?

Guirec (élu étudiant au Conseil d’Administration)