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[discussions] CAPES encore

Posté par Emmanuel Lyasse le 28/2.

piece jointe : TEXT/HTML
J'ai passé une partie de la nuit à survoler le texte de Lang transmis par
Cécile. Ça confirme l'impression que m'avait donnée les dépêches. Beaucoup
de bla-bla psycho-péda, une protestation de bonnes intentions à l'égard de
la notion de savoirs à transmettre: la beurre et l'argent du beurre, en
somme, mais l'équilibre n'est qu'apparent.
Les deux scandales déjà cités sont bien là. Sur le premier, il faudrait que
les syndicats étudiants fassent quelque chose. Sur le second, il est vital
que les professeurs stagiaires se mobilisent contre le triplement de la
période de flicage avant titularisation.
Sur la question essentielle, le CAPES, c'est le flou total. J'isole le
paragraphe qui annonce une réforme des programmes "En ce  qui concerne les
programmes des CAPES, le problème qui se pose dans certains cas n¹est pas,
contrairement à ce qui a parfois été dit,  celui de l¹opposition entre
théorie  et pratique. Il est bien plutôt celui de la définition des
enseignements théoriques qui sont utiles à de futurs enseignants. Une
réflexion a été ouverte au sujet des épreuves de certains concours. D¹autres
seront proposées. Dans quel esprit peut-on les conduire ? Permettez-moi
quelques remarques .
Un professeur de collège ou de lycée, spécialiste d¹une ou de deux
disciplines, doit avoir la capacité de s¹informer de façon approfondie sur
une question, d¹analyser et de synthétiser des sources de documentation
diverses, de trouver aisément les accès aux travaux d¹une recherche en
constante évolution. Par ailleurs, il est bon qu¹il ait, sinon des ³ clartés
de tout ², du moins des connaissances suffisamment larges pour ne pas être
totalement démuni dans l'exercice quotidien de son métier ; bref il est
souhaitable qu¹il dispose d¹une solide culture générale.
Les programmes du CAPES devront donc répondre à cette double nécessité : ils
seront conçus de manière à conduire les candidats à un travail
d¹approfondissement dans un ou plusieurs domaines, sur une ou plusieurs
questions, et aussi de manière à conforter leur culture générale dans la ou
les disciplines concernées ; bref de manière à former des ³ spécialistes
cultivés ² qui pourront aborder avec aisance les programmes des collèges et
des lycées.
Au total, les épreuves du CAPES, avec cette double exigence, devront
garantir le haut niveau disciplinaire des futurs enseignants, niveau acquis
grâce aux trois années d¹études qui précèdent le concours et grâce à
l¹ensemble de l¹année de préparation à ce concours."
Rien de clair n'est défini. Ce peut être aussi bien un petit toilettage que
la grande liquidation prévue par feu Allègre (laquelle reposait, rappelons
le sur le principe "Les professeurs n'ont pas à en savoir plus que leurs
élèves"). On aimerait bien saovir ce qu'il en est avant la rentrée
prochaine.

En revanche sur la question cruciale entre toute, la séparation entre écrit
et oral que prévoyaient les projets précédents, un paragraphe semble pouvoir
nous rassurer, et nous confirmer que nous n'avons pas viré Allègre pour rien
"La date des écrits des capes sera fixée  avec un échelonnement qui respecte
la spécificité des disciplines : un peu plus tôt en particulier pour les
capes qui supposent une préparation intense à des épreuves de travaux
pratiques ; elle restera fixée aux dates actuelles en particulier pour les
capes de lettres et de sciences humaines"
Il y a lieu d'être rassuré pour ce qui concerne les Lettres. Pour les
Sciences, j'ignore si l'argumentation ministérielle vaut quelque chose, ou
si simplement Lang juge les scientifiques moins combatifs. J'attends des
précisions de plus compétent que moi.
La suite est cependant hallucinante
"Enfin j¹estime qu¹il y a un délai trop long qui s¹écoule entre la fin des
écrits et la publication des résultats de cet écrit : parfois plus de deux
mois. Cette situation est très mal ressentie par l¹ensemble des étudiants.
J¹ai donc demandé à Monsieur le Directeur des personnels enseignants de
prendre les mesures techniques qui permettront de raccourcir ce délai, ce
qui permettra aux candidats admissibles de se sentir plus mobilisés pour la
préparation d¹un oral qu¹ils auront la certitude de passer. Ceci permettra
d¹améliorer l¹efficacité de la préparation de l¹oral."
C'est effectivement très pénible de devoir attendre le résultat lorsqu'on a
passé un examen, mais chacun sait que c'est le délai nécessaire à la
correction des copies. De deux choses l'une. Soit il s'agit là d'une
sornette démagogique d'un ministre qui n'a pas fait d'études, qui restera
sans conséquence. Soit il y a là un projet de réduire le nombre et / ou la
durée des épreuves, ce qui serait le seul moyen de réduire les délais de
correction.

Pour l'oral, on ne touche apparemment pas aux épreuves sérieuses. En
revanche, l'épreuve prétendument professionnelle instaurée par Jospin est
violemment critiquée, et son chambardement annoncé.
"L¹épreuve orale sur dossier des concours de second degré est actuellement
très floue ; elle a des caractères très différents selon les concours et les
candidats ne savent pas toujours à quoi ils doivent s¹attendre.
J¹ai donc pris la décision de la renouveler : cette épreuve, commune à tous
les concours s¹intitulera désormais ³ entretien avec le jury ² et sera
conçue comme une épreuve préprofessionnelle.  Elle  permettra d¹apprécier la
motivation du candidat, de vérifier la qualité de son expression orale,
d¹évaluer ses capacités de communication ; elle sera l¹occasion d¹un
entretien libre sur son expérience de stage,  sur sa réflexion concernant sa
discipline, sur sa connaissance du système éducatif.  Cette épreuve donnera
lieu à un texte de cadrage et sera ensuite définie avec rigueur dans le
cadre de chaque concours. Dans le cas particulier du concours de professeur
des écoles, (...) Cette épreuve  constituera un élément de
professionalisation des concours."
Il n'est évidemment pas question de prendre la défense de cette mascarade.
Monsieur Lang vient de découvrir ce que nous savions depuis dix ans: qu'elle
ne faisait qu'ajouter une dose de hasard dans le résultat des concours. On
pouvait donc espérer qu'elle fût supprimée. Ici, au contraire, le ministre
décide manifestement d'assumer le caractère bidon (patent depuis son
origine) de l'épreuve, en ôtant tous les éléments qui semblaient lui donner
un contenu pour en faire un simple entretien d'embauche.
Il y a un progrès pour les candidats: ils ne seront plus obligés d'apprendre
des sottises, et sauront dès le début qu'ils seront notés au hasard
essentiellement, accessoirement sur leur façon de se présenter. En revanche,
au niveau du recrutement, le problème reste le même.

Enfin, il n'est absolument pas question d'agrégation. Les optimistes verront
là une raison de se réjouir parce qu'on n'y touche. Les pessimistes
penseront qu'on la considère déjà comme liquidée.

Pour le reste, je n'ai fait que survoler, sur des domaines que je connais
très peu de plus. Je remarque cependant qu'il est beaucoup question de
licences professionnelles à propos du recrutement des enseignants du
technique, ce qui ne présage rien de bon.

Pour résumer,
1) Il n'y a évidemment pas de raisons de crier "Aux armes" comme nous
l'avons si souvent fait, à raison.
2) Ce serait cependant une erreur de conclure "Beaucoup de bruit pour rien".
Les mesures annoncées, si elles ne liquident pas le CAPES, le dégradent
encore un peu plus.
Le renforcement et l'allongement du flicage des jeunes certifiés (et agrégés
?) par les odieux et inutiles IUFM est scandaleux.
Le choix donné aux candidats entre une pitrerie préprofessionalisante en
licence (qui diminue d'autant son contenu disciplinaire) ou un stage de
glandage en fond de classe l'année du concours (temps perdu pour sa
préparation) est également scandaleux.
Dans les deux cas, le statut de fonctionnaire est remis en cause, puisqu'on
ne titularise que progressivement, et qu'on prétend recruter sur licence
partiellement bidonnée, et non sur le grade universitaire.
De plus, les non dits sur les programmes laissent la porte ouverte à de très
mauvaises surprises.
Gardons l'arme au pied, donc.
On peut voir là aussi l'occasion de reprendre la campagne anti IUFM, avec un
argument de poids: c'est le ministre lui-même qui avoue que leur bilan est
calamiteux. Evidemment, sa solution est "Encore plus d'IUFM". Mais nous
pourrions avancer les nôtres. Nous pourrions sans doute nous trouver
d'accord avec beaucoup d'enseignants du secondaire et du supérieur.