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[discussions] bon, et la reforme ? Version longue

Posté par =?iso-8859-1?q?alban=20desoutter?= le 18/5.

Pardon, je vous avais livré la version courte du
texte. Je vous fais parvenir la version longue. 
a bientôt; j'attend toujours les commentaires (pour
l'intégrale des textes, un seul site : celui du
ministère!)
Alban



Autonomie des facs, système ECTS : un nouveau pas vers
la professionnalisation, vers la casse du service
public.

Le gouvernement, par la voix de son ministre de
l’éducation Jack Lang, vient d’annoncer les grandes
lignes de son projet. Celui-ci n’est rien de moins
qu’un plan de casse du service public. Les
propositions de Jack Lang lors du dernier CNESER
s’accordent parfaitement avec la volonté de la CPU
(conférence de présidents d’Universités) de renforcer
l’autonomie des facs. Cette réforme est de grande
ampleur : la liquidation des diplômes tel que nous les
connaissons se fera en trois ans, et pourrait
commencer dès la rentrée si aucune riposte n’est
envisagée par les syndicats.

La CPU pour l’autonomie des universités.

Lors de la CPU du 19 avril 2001, un texte a été
adopté, afin de préparer le terrain pour la réunion du
CNESER sur ECTS. Le texte a pour but de « renouveler »
le service public. L’idée principale est sans
ambiguïté : renforcer l’autonomie des universités, et
de tout mettre en œuvre pour parvenir à casser la
réglementation nationale, tant sur la question du
contenu  pédagogique, que sur le statut du personnel,
du financement de l’université que sur l’orientation
de la recherche : « La CPU considère que,…, les
universités [doivent bénéficier] d’une autonomie de
pilotage et de  gestion considérablement renforcées »
.
Cette autonomie a plusieurs volets. Le premier
concerne la possibilité de gestion budgétaire
directement par les universités, sans passer par les
contrat avec l’état jugé trop contraignant.
Conséquence direct de cette mesure : la possibilité
d’orienter le financement de la recherche, de gérer le
personnel de façon la plus « rentable » possible, avec
une réelle menace pour le statut du personnel : « [La
CPU] suggère que la négociation du contrat relève
ensuite d’une approche globalisée et consolidée, avec…
un volet identitaire, permettant à l’établissement de
mener une véritable politique de gestion des
ressources humaines et financières dans un cadre
pluri-annnuel. »
Ensuite, et c’est cela qui est le plus menaçant si on
le rapproche des mesures Lang, c’est que, l’autonomie
concerne aussi les questions pédagogique. Avec
l’apparition des licences professionnelles, cela n’est
nouveau en rien, mais une généralisation pourra être
effectuée dans le cadre de l’autonomie renforcée, et
l’approbation du diplôme se fera… une fois le diplôme
créé et mis en place (!) : « En matière d’habilitation
des formations, la CPU souhaite vivement une
simplification des procédures (passer d'une
habilitation a priori à une évaluation a posteriori)
laissant l’initiative aux universités ». Si cette
mesure est mis en place, ce sera un occasion en or
pour liquider lentement les formations et cursus
traditionnels (le financement de diplômes locaux se
fera par l’université, et au détriment des cursus
nationaux), sans possibilité de contrôle par l’état.
Sur la recherche, il n’y a rien de bien nouveau : la
tendance a abandonner la recherche fondamentale au
détriment de la recherche répondant au besoin des
entreprises locales ne va que s’intensifier. Si rien
n’est clairement dit quant à l’utilisation des
ressources tirer du partenariat
universités-entreprise, on peut imaginer que les
entreprises ne vont pas donner des fonds sans
contrepartie avantageuse pour elles en ce qui concerne
l’orientation de la recherche C’est évidemment un pas
de plus dans le sens de l’abandon de toute
indépendance des universités en matière de recherche. 
« La valorisation de la recherche doit être fortement
encouragée par la mise au point de dispositions
fiscales incitatives et réellement novatrices
permettant le développement des ressources propres de
l’établissement. Les retombées économiques de la
recherche sont naturelles. Négliger les ressources
que, tout en préservant leur autonomie, les
universités peuvent tirer de leurs relations avec le
secteur économique serait une erreur. »
Afin de pouvoir appliquer concrètement cette
orientation en matière de recherche et de pédagogie,
la CPU propose de créer des organismes régionaux où se
côtoieront patrons et représentant des collectivités
locales : « De tels contrats justifient la mise en
place, dans chaque établissement, d’un conseil
d’orientation stratégique, rassemblant les différents
partenaires régionaux (région, départements,
communautés de villes et l’agglomérations, partenaires
socio-économiques et professionnels). »
Enfin, afin de faire passer plus facilement toutes les
décisions prises par les universités au niveau local,
la CPU ne propose pas moins que de réformer les
statuts des Conseil d’Administration. Ainsi, alors que
2/3 des membres des CA étaient nécessaires pour
entériner une décision, il suffira dorénavant d’avoir
2/3 des présents. Concrètement, s’est écarté les
étudiants, qui sont les moins nombreux à siéger
proportionnellement aux autres catégories d’élus (ceci
étant du à la longueur, à la technicité des réunions
du CA ou du CEVU), et facilité l’adoption de mesures,
qui maintenant demande plus d’unanimité. 

Jack Lang propose un « Maastricht de l’éducation ».
Ou encore : le MEDEF en rêvait, le plan l’a proposé…
et Jack Lang commence à le faire !

Jack Lang, à travers son intervention au dernier
CNESER, semble reprendre en grande partie les idées de
la CPU. Afin de mieux ancrer les universités
françaises aux schémas de l’Europe, et sous prétextes
de vouloir favoriser la mobilités étudiantes, le
ministre propose le système ECTS (terme anglais
traduisible par « système européen de transfert de
crédit »). Les « diplômes » ne seront plus calculé sur
une formation à l’année ou au semestre, mais par l
biais d’un capital de point (« l’euro des universités
» selon Jack Lang). Par exemple, une licence française
vaudra 180 crédits, et les modules couvriront non plus
les seuls enseignements, mais aussi les stages et le «
travail personnel » (!). Un étudiant pourra alors
s’inscrire en cours d’année, ce qui résout la question
des aides sociales : un parcours moins « tubulaire »
pourra permettre de concilier plus facilement études
et travail salarié.
Le but, s’il n’était facile à deviner, nous est avoué
par Lang lui même : « tout l’enseignement supérieur,
d’une certaine manière, est à vocation professionnelle
: la professionnalisation des formations sera mieux
prises en compte. » (le Monde du 24 avril 2001). Alors
que la licence professionnelle était une
professionnalisation « expérimentale », la «
professionnalisation durable » (terme inventé par Jean
Luc Mélenchon, à l’avant garde dans ce domaine) va
introduire les « compétences » de façon généralisé,
afin de canaliser les étudiants plus facilement vers
des cursus dont le contenu répond aux exigences des
entreprises.
Les parcours se feront alors « à la carte » (terme
déjà utilisé au moment du débat sur les retraites !)
avec le choix entre plusieurs cursus. Lang répond
alors aux attentes de la CPU : « Il me semble…
indispensable qu’un texte-cadre précise les conditions
dans lesquelles les universités pourront innover,
ouvrir de nouvelles voies qu’actuellement cette
réglementation ne permet pas ». 
Ensuite, sa volonté de mettre des bornes à cette
autonomie est hypocrite : Jack Lang déclare vouloir
mettre des conditions à la réforme et, parlant du
cadre national du diplôme : «
D’abord le respect absolu du diplôme national. Il
n’est évidemment pas question de remettre en question
ce principe fondateur de tout notre enseignement
supérieur. En clair, cela veut dire que l’Etat doit
continuer à fixer le cadre dans lequel les
établissements proposent leurs filières de formation,
que ces propositions doivent faire l’objet d’une
évaluation  nationale portant sur leur pertinence et
leur qualité et qu’in fine, après avis du CNESER,
l’acte juridique d’habilitation – c’est-à-dire
d’autorisation à délivrer les diplômes- est pris par
le Ministre » Le seul problème, c’est que depuis
l’apparition des licences professionnelles, une drôle
de conception du cadrage national du diplôme est
apparu : l’habilitation en dernière instance par le
ministre ! Un simple tampon est donc synonyme ici de
diplôme national. Il ne restera plus au ministère,
qu’à répertorier les différents cursus qui lui seront
soumis par les universités, comme pour la licence
professionnelles, où 195 LP sont « répertoriées ».
Enfin, en plus de l’introduction d’un supermarchés des
compétences, le gouvernement veut développer
l’enseignement à distance. En effet, si l’on augmente
l’autonomie des universités, le financement national
de l’état concernera les filières traditionnelles.
Comment rogner de l’argent si ce n’est sur les postes
de profs ? Le télé-enseignement répond immédiatement
au manque moyens et au désengagement de l’état : plus
de table, ni de locaux… ni de profs ! Les étudiants,
devant un écran, dispersé, ne risquent pas non plus de
se regrouper et de lutter. Le gouvernement vient
justement de lancer un appel d’offre pour le lancement
d’un « campus numérique français » pour favoriser
l’enseignement à distance, projet doté de 50 millions
de francs.

Liquidation de l’aide sociale ?

Enfin, ce que ne dit pas Jack Lang, mais que souligne
le texte préparatoire à la conférence de Prague, c’est
que ce système est parfaitement adapté aux régimes de
salariats étudiants. Ce qui est une double aubaine
pour le patronat et le gouvernement : avoir une main
d’œuvre bon marché, flexible, en ce qui concerne les
entreprises qui emploie un grand nombre d’étudiants
(restauration rapide, divers petits boulots), et pour
le gouvernement, ne pas investir un sous de plus pour
l’aide social (ce qui tranchera le débat :
augmentation du nombre de bourses ou allocation
d’étude ? Ni l’un ni l’autre : tous au boulot !). Dans
ledit texte « Construction de l’espace européen de
l’enseignement supérieur », on peut ainsi lire : «
Cette approche pourrait être favorisée par
l’identification d’un régime pédagogique de l’étudiant
en temps partagé conduisant à rendre plus adaptable
une offre aujourd’hui construite pour des étudiants à
temps plein. Cette mesure aurait l’avantage de
renforcer l’intégration formation initiale/formation
continue en s’appliquant aussi bien aux «
salariés-étudiants » qu’aux « étudiants-salariés ».
Elle s’accompagnerait d’une politique d’information la
plus complète possible et d’un appui à la construction
des parcours. » Même plus la peine de chercher la
logique sous jacente dans les textes du ministère, à
présent, il nous annonce la couleur sans détour !
Donc, si les parcours ne seront plus conçus pour des
étudiants à « plein temps », mais adaptés à des
régimes de salariats étudiants, qu’est-ce qui nous
garanti que le gouvernement acceptera de continuer à
verser des bourses, des allocations d’études ? Ainsi,
il y aura deux vitesses pour les parcours : « rapides
», pour les étudiants qui auront des ressources
extérieures suffisantes (parents, petit(e) copain(ine)
salarié(e) à temps plein), et plus long pour les
autres. Le texte l’avoue implicitement quelques lignes
plus haut : « Ainsi, la définition du niveau licence
par 180 crédits obtenus permet à la fois de mieux
prendre en compte les parcours « amont » des étudiants
qui peuvent être très divers…, leurs objectifs
universitaires et leurs rythmes d’apprentissage. Dans
cet esprit, on pourrait admettre qu’une licence
s’obtienne par un parcours total plus court ou plus
long que la durée théorique de 3 ans. » 
Parcours « individualisés», cursus professionnalisés
prises en compte des stages dans les diplômes,
régionalisations de la carte universitaire, le tout
dans le cadre de l’autonomie pédagogique et financière
des universités, voilà à quoi Jack Lang veut aboutir
d’ici 3 à 5 ans, avec des rythmes différents pour
chaque universités (il sera plus dur de faire passer
la réforme dans des villes ou des luttes étudiantes
ont eu lieu, et où les étudiants sont plus informés
qu’ailleurs). Après cette période de cohabitation
entre cursus cadrant avec la réforme de 97 et les
diplômes à points capitalisables, seuls ces derniers
seront acceptés dans les universités.

Il faut une riposte !

Lors du dernier CNESER, rares sont les organisations à
exprimer leur craintes de voir le cadre national des
diplômes voler en éclat : du Medef à la Fage, tout n’a
été que éloge hormis la FSU.
En effet, alors que la FAGE approuve « l’audace » du
premier ministre et réaffirme son soutient à la
réforme, le MEDEF, lui, déclare que « les milieux
économiques, MEDEF et CGPME, apportent leur appui [aux
propos du ministre] ». Par contre, l’UNSA « souscrit à
la démarche », et la CFDT rappelle : « on est
évidemment d’accord avec le principe de construction
de l’espace européen. Venant de la CFDT, ce serait
très surprenant qu’on ait une position hostile à cette
démarche » pour finir par affirmer son soutient aux
mesures du gouvernement (quelle surprise !).
Marion Brun, représentante de l’UNEF, a déclaré : « Et
que donc, ECTS, oui, pourquoi pas, mais cela reste un
outil, alors pourquoi pas ? ». Bien dit !
Quant à l’UNEF-ID elle a déclaré par la voix de son
élu au CNESER: « L’UNEF-ID, elle ne prendra pas comme
attitude de rejeter tout en bloc et de condamner de
manière unilatérale car elle aura quelques désaccords
». Propos contredit par le dernier congrès de
l’UNEF-ID où une motion a été adoptée refusant le
projet en l’état. Ce qui est un progrès mais qui ne
résout pas le problème de fond : il faut refuser cette
réforme, et ne pas simplement vouloir l’amender. 
Si le gouvernement se permet autant d’audace dans sa
politique de casse de l’unité géographique, principe
clef du service public, et de destruction de nos
acquis et de nos droits, une riposte est plus que
nécessaire. La seule perspective pour le ministre est
d’intégrer toute les organisations syndicales dans le
processus. Nous devons répondre de façon contraire, en
poussant toutes les organisations étudiantes à ne pas
participer à la mise en oeuvre ce sale plan, et à
s’engager dans la lutte contre les réformes
Allègre-Lang. 
Jack Lang veut nous imposer sa réforme pour la rentrée
2001, avec une loi cadre cet été. Par simple souci de
démocratie, une réforme (quelle soit acceptable ou
non), ne peut et ne doit pas se faire dans le dos des
étudiants, sans les avertir ! A nous d’informer
immédiatement les étudiants pour empêcher un acte
irréversible, qui nous conduirait à constater à la
rentrée, la mise en place d’une réforme qui serait la
fin de l’université telle que nous la connaissons
aujourd’hui.




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