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[discussions] Tract de la FSE sur la reforme Lang

Posté par =?iso-8859-1?q?syndicat=20fse?= le 4/11.

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Voici le texte du tract national de la Fédération Syndicale Etudiante concernant la réforme Lang de l’enseignement supérieur. Pour nous contacter : 
E-mail : fse_org@yahoo.fr  

Site web : www.luttes-etudiantes.com 

 

 

Réforme Lang : diplôme à points, diplôme qui vaut rien.

 

Dans son discours du 4 octobre dernier, Jack Lang a exposé ses projets de réformes pour l'Université. Bien que semblant assez diverses, ses orientations s'inscrivent dans une même logique de casse du service public, qui était déjà celle de son prédécesseur Claude Allègre.

 

La principale innovation de la future réforme Lang est l'instauration du système de crédits, dit ECTS (European Credit Transfer System). Déjà annoncé le 23 avril 2001, ce système revient à mettre en place des "diplômes à points". Concrètement, un diplôme universitaire ne s'obtiendra plus par année, avec des examens par matière validant l'assimilation de connaissances, mais par une accumulation de points. Par exemple, tel cours de psycho donnerait 8 points, un cours d'anglais donnerait 6 points, un stage en entreprise donnerait 10 points, etc... Une année s'obtiendrait au bout de 60 points, soit 120 points pour valider un DEUG et 180 pour une licence. Le ministre a été très clair : "J'ai décidé la généralisation de ce système à toutes les filières".

 

En théorie, ce système doit favoriser la mobilité des étudiants dans les différents pays d'Europe (on va étudier un peu à l'étranger, et ce séjour est validé par des points). Pourtant, ces séjours coûtent cher, et Lang n’a annoncé que 4000 bourses de mobilité, ce qui est ridicule pour 2 200 000 étudiants ! En réalité, on sait bien que l'actuelle "harmonisation européenne" de l'enseignement supérieur est destinée à transposer le système anglo-saxon en Europe. La division de l'année en semestres (instaurée par Bayrou en 1997) puis l'organisation des cursus en 3/5/8 (sous l'impulsion d'Allègre dès 1998) ont déjà entamé cette mutation. 

 

La casse du cadre national des diplômes

 

Premièrement, dans le cadre des ECTS l'accréditation des points par ECUE (ou matière) n'est garantie par aucun cadre national. Mais le système des crédits capitalisables permet aussi de faire avancer la pluridisciplinarité. Ce système fait que les diplômes ne seront plus spécialisés sur une discipline, mais mixtes. Par exemple, un DEUG qui mélange lettres modernes, histoire et espagnol (c’est le cas à Nîmes). Quel est le but de ce type de DEUG ? Voyons ce qu'en dit Jack Lang : "La pluridisciplinarité a d'une façon générale l'avantage [...] de donner un cadre commode pour la professionnalisation des formations". Concrètement, on va regrouper des filières pour faire de beaux diplômes exprès pour les entreprises locales. Et si on change de région, le diplôme est-il reconnu nationalement ? Evidemment non, c’est tout l’enjeu de la régionalisation des diplômes. Pendant ce temps, Lang continue quand même à parler de mobilité des étudiants...

 

De plus, la pluridisciplinarité amène au regroupement des filières dites non-rentables, donc à terme il y a un risque de disparition de ces filières en tant que telles. Au-delà, c'est la continuation du lycée à l'université : un DEUG avec un peu d'histoire, un peu de maths, un peu d'anglais, cela existe déjà : ça s'appelle le bac. A ceci près qu'il faut justement avoir le bac pour entrer à l'université. L'intérêt de le repasser une fois arrivé à la fac nous semble excessivement limité. 

De manière générale, la pluridisciplinarité empêche tout approfondissement des connaissances, et entraîne la création de diplômes locaux, sans reconnaissance nationale (suivant en cela l'exemple des licences professionnelles).

 

Manque de moyens généralisé

 

Fidèle à ses méthodes, Lang veut faire passer sa réforme en essayant de faire croire qu'il va donner beaucoup plus de moyens à l'enseignement supérieur : or, loin des effets d'annonce, force est de constater que le nombre de créations de postes est ridicule par rapport aux besoins. Si 648 postes d'enseignants seront créés à la rentrée 2002, il en manque actuellement... 13 592 ! (1) C'est-à-dire qu'il sera créé 4,8 % des postes nécessaires. Bonjour le foutage de gueule ! Les créations de postes de personnels administratifs et techniques (IATOSS) vont quant à elles carrément diminuer de 8 % a la rentrée 2002 ! Pourtant, il y a là aussi une situation de pénurie : il manque 5 425 postes. Mais ça ne semble pas préoccuper Jack Lang. 

Notre ministre est au contraire très fier d'annoncer que le nombre d'étudiant par enseignant va baisser en moyenne de 0,65. C'est-à-dire que, au sein des amphis surchargés, il y aura un tronc et un bras d’étudiant en moins. On avance doucement. Toujours est-il qu'on se rend bien compte, au vu des chiffres, que l'autosatisfaction de Lang quant aux créations de postes est sans rapport avec la réalité, et que sa volonté n'est pas de s'attaquer au manque de moyens dont souffre l'enseignement supérieur.

 

Objectif : professionnalisation

 

Toute la subtilité de la réforme Lang consiste à profiter de l'instauration du diplôme à points pour remplacer l'esprit universitaire par l'esprit d'entreprise. Le but, en accord avec le MEDEF (groupement des patrons), est de remplacer les connaissances par les compétences. C'est une différence énorme : l'université ne serait plus un lieu de création et de transmission de savoirs, permettant l'émancipation intellectuelle et le développement de l'esprit critique. Au contraire, ce serait une antichambre des entreprises, avec une formation ayant pour but de "rentabiliser" l'université (et les étudiants). C'est contraire au principe de service public, et c'est de plus totalement inefficace : s'il n'y a que 8 emplois pour 10 étudiants, on peut réformer la fac dans tous les sens, il n'y aura quand même que 8 emplois pour 10 étudiants.

 

Lang a également annoncé "un grand développement des stages". Les licences professionnelles comprennent déjà un stage obligatoire (et non-remunéré) de 12 à 16 semaines, soit la moitié de l'année universitaire. Ce principe sera étendu, notamment dans le cadre des cursus pluridisciplinaires et du diplôme à points. Concrètement, l'étudiant paiera ses frais d'inscription pour aller travailler bénévolement dans une entreprise, et ainsi occuper la place d'un chômeur. Les stages se feront également au détriment de l'acquisition des savoirs fondamentaux.

 

Le statut des enseignants-chercheurs sera à nouveau révisé, pour mieux prendre en compte "le développement de l'enseignement en ligne, l'accroissement considérable de la professionnalisation des études, l'investissement des chercheurs dans le monde de l'entreprise". Les étudiants ne sont donc pas les seuls visés.

 

Jack Lang souhaite également la disparition des DEA et DESS, et leur fusion au sein des "mastères", diplôme tout droit sorti du rapport Attali de 1998. Cela pour avancer encore dans la logique du 3/5/8 (puisqu'il s'agit de diplômes à bac +5) et l'adaptation au "modèle" anglo-saxon, plus précisément au "master's degree", qui est l'équivalent du bac +5 américain. 

 

L'autonomie croissante des universités

 

Lang a annoncé qu'il souhaitait "donner plus de capacités d'initiative" aux universités, en particulier à leurs présidents. Cela implique une plus grande autonomie des facs, donc un pas de plus vers la fin d'un cadre national, seul garant possible d'un service public égalitaire. En contrepartie, les facs seront soumises à "une évaluation fréquente, régulière et systématique". C'est aller encore plus loin dans la mise en concurrence des universités entre elles.

 

Le ministre a également annoncé l'ouverture à cette rentrée de dix "campus numériques". Le but selon Lang est de "permettre à la France de garder sa place dans un contexte de concurrence internationale". Le savoir n'est plus considéré comme une richesse collective qu'il faut partager, mais un marché sur lequel il faut être compétitif. Cela revient à gérer l'enseignement supérieur comme une entreprise, ce qui participe au processus actuel de marchandisation et de privatisation des universités. 

 

Enfin, afin de se mettre dans la poche les structures étudiantes institutionnelles, Lang a également annoncé pour les étudiants engagés dans les actions associatives : "une validation de ces actions dans le cadre de la formation". C'est-à-dire que des étudiants pourraient obtenir des points en fonction de leur participation à des actions associatives. Le but pour le ministère est d'acheter les élus étudiants des universités, en échangeant des crédits pour leur diplôme contre leur silence face aux réformes actuelles et au manque de moyens. Nous n'accepterons pas ce système non égalitaire favorisant les membres des associations proches du ministère. Les membres de la FSE n'accepteront jamais d'en bénéficier.

 

La réforme Lang constitue une attaque de plus contre nos conditions d'étude. Néanmoins, elle n'est pas une fatalité. Nous appelons l'ensemble des étudiants et des personnels de l’enseignement supérieur à s'unir contre cette réforme, tant qu'il est encore temps !

 

Non au diplôme à points !

Non à la privatisation rampante des universités !

Pour une Université de service public, gratuite et laïque !

Réengagement financier total de l'Etat dans l'enseignement supérieur !

 

Les citations sont extraites du discours de Jack Lang du 4/10/2001. Vous pouvez en consulter le texte intégral sur : 

www.luttes-etudiantes.com/droits/contenu/discourslang2001/001.html

 

(1) : Chiffres du SNESup.



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