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CNESER 2002: notre proposition de profession de foi pour la liste le 27 mai
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La question de la représentation étudiante n’a jamais été posée avec autant d’acuité.

On a longtemps considéré la condition étudiante comme transitoire, et privilégiée. Cette idée demeure aujourd’hui encore, alors que pourtant les faits la démentent.

On a beaucoup parlé de "démocratisation" de l’Université. Aujourd’hui, sa massification est un fait : la majorité de chaque classe d’âge a ou aura le statut étudiant.

Ce devrait être un progrès. Mais à cette massification a correspondu une dégradation d’une part du statut d’étudiant, d’autre part des bénéfices que chacun peut espérer tirer du fait d’avoir été étudiant.

Ce n’est pas le fait d’une fatalité, mais d’une politique constamment et délibérément menée par les gouvernements qui se sont succédé, quelle que soit leur étiquette. Depuis plus de trente ans, le pouvoir a répondu à l’augmentation du nombre d’étudiants par la dégradation de la condition d’étudiant et de la qualité des études. Toutes les réformes, depuis la loi Faure de 1969, sont allés dans le même sens et n'ont été que les étapes d'une unique Réforme, dont les objectifs sont aujourd'hui en passe d’être atteint.

Cette Réforme tient en un mot : privatisation.

Dans le contexte global d’une idéologie qui fait de la réduction des dépenses publiques un objectif premier, qui encourage les professeurs à créer leurs start-up (loi Allègre sur l'innovation), l’Etat finance de moins en moins l’enseignement supérieur. Le financement est reporté, d’une part, sur les "usagers" - baisse de l’aide sociale, hausse exponentielle des frais d’inscription. D’autre part, on présente comme un progrès la participation des entreprises privées. Mais, en échange, on leur livre le contenu de nos formations.

Les principales réformes ne sont que les étapes de cette privatisation. La loi Faure a instauré l’autonomie des Universités, autant dire leur soumission à des intérêts privés. La loi Savary (1984) l’a renforcée, en particulier en ouvrant leurs conseils à des personnalités extérieures. La réforme de 1997, préparée par Bayrou, appliquée par Allègre, a cassé, par la semestrialisation, la cohérence de l’année universitaire, diminué la part des enseignements fondamentaux, instauré une logique de bachotage permanent, et remis en cause les conditions d’examen (avec en particulier la possibilité donnée aux Universités de remettre en cause la session de septembre). Le plan U3M d’Allègre a officialisé le changement total de fonction de l’enseignement supérieur : non plus donner une formation intellectuelle et professionnelle pour la vie, mais satisfaire les exigences à court terme du patronat. Les licences professionnelles, qu’il a créées , sont ainsi des diplômes bidon, dont l’épreuve essentielle est un stage sans garantie de paiement, noté par le patron.

La réforme que Lang a laissée en partant, et dont Ferry a déjà dit qu’il l’appliquerait, achève largement le travail : sous couleur d’ "harmonisation européenne", elle marque en effet la fin de la valeur nationale des diplômes. Un diplôme ne sanctionnera plus désormais l’acquisition d’un niveau de connaissances dans un domaine précis, mais l’accumulation par l’étudiant d’un certain nombre de points dans des matières variées, à charge pour lui de le faire valoir pour trouver ensuite un emploi… sans garantie de durée puisque de tels "diplômes" seront rapidement périmés.

Les arrêtés adoptés par le CNESER (avec l'abstention bienveillante de l'UNEF le 26 novembre 2001) impliquent la dévalorisation immédiate des DEUG et maîtrise, ainsi que la casse du cadre national des diplômes : ceux-ci seront désormais accompagnés d'une "annexe descriptive" qui indiquera les cours suivis par l'étudiant, sur quels campus.

Le CNESER a aussi voté le dispositif de "validation des acquis de l'expérience" (VAE). Il prévoit que les diplômes universitaires puissent être accordés sur la seule base de l'expérience professionnelle d'un candidat, c'est-à-dire sans formation théorique, ni examen. Les diplômes seront alors délivrés par des jurys comprenant obligatoirement des représentants du patronat. Il s'agit clairement d'une entreprise démagogique de déqualification.

La même logique liquidatrice a dicté la politique scandaleuse à l’égard des étudiants étrangers. Seuls sont considérés comme intéressants ceux qui peuvent payer et rapporter . Les autres, principalement issus des pays francophones d’Afrique, sont persécutés. Depuis la circulaire Sauvé-Marchand de 1991, c’est la police qui décide lesquels sont de vrais étudiants et expulse les autres : la carte d’étudiant délivrée par une Université ne suffit plus.

L’accélération de cette politique de casse ces dernières années a été rendue possible par l’incapacité des étudiants à s’organiser pour se défendre au niveau national. La réforme Devaquet de 1986, la réforme Jospin de 1992 avaient échoué devant leur mobilisation : Devaquet n’avait même pas rêvé ce que Lang a décrété et que Ferry s’apprête à appliquer.

La précarisation croissante de la condition étudiante a diminué la capacité de mobilisation ; l’effacement des organisations progressistes sur les facs en a détruit les cadres. C’est ainsi qu’on a pu arriver à un quasi monopole d’une soit disante représentation étudiante par des professionnels de la chose. Les réformes qui ont cassé l’Université publique ont en même temps (ce n’est pas un hasard) favorisé cette fausse représentation. La loi Faure l’a instaurée, la loi Savary l’a perfectionnée. Avec la réforme Lang, nous atteignons un sommet, déjà envisagé par Bayrou : grâce à la "validation des expériences", l’activité de "représentant" permettra d’obtenir ces fameux points qui composeront les diplômes mécano. Traduction : les élus étudiants disciplinés seront diplômés ès-qualité. Remarquable cynisme !

Ainsi il n’y a pas de raison de s’étonner de lire, dans le bilan des élus au CNESER de l’UNEF (qui a entre-temps cessé d’être ID, indépendante et démocratique) que la réforme Lang ne remet pas en cause les acquis étudiants. C’est une conception de la représentation des intérêts étudiants qui se passe de commentaire.

Nous savons tous comment ces représentants sont élus. Les jours d’élection locale, alors que rien n’est fait de sérieux par l’administration (on la comprend) pour susciter l’intérêt des étudiants, des brigades bureaucratiques de cette organisation affluent de toute part et nous assomment de leur propagande.

Des résistances se manifestent localement mais, le système conçu pour cela aidant, sont restées jusqu’à aujourd'hui locales.

Face à cela, le besoin est criant d’une organisation nationale, vraiment syndicale et vraiment étudiante, pour exprimer le refus de la logique à l’œuvre depuis plus de trente ans, pour défendre, collectivement et individuellement, les étudiants qui en sont victimes.

Les élections du CNESER, cœur du système de la fausse représentation, peuvent aujourd’hui être la première étape de la construction d'une telle organisation. Grâce à l'union de toutes les organisations qui refusent la casse de l’Université publique, cette liste peut avoir au moins un élu. Un élu qui, au contraire de tous les autres :

Et, dans ces votes, rejettera

Avoir un tel élu, sur onze, ne saurait être une fin en soi. Nous nous engageons à poursuivre cette dynamique unitaire qui devra déboucher sur la création d'une force syndicale représentant les véritables intérêts des étudiants de France.

Si chacun assume ses responsabilités, ce but peut être atteint.