Éléments d'histoire sur la fin de l'UNEF (1997/2001)

Voir le (long) tˇmoignage personnel dÕEmmanuel Lyasse sur le mois de juin 2000
initialement publiˇ sur son blog, en septembre 2020

En introduction à la reprise du site unef.org tel qu'il était en 2000 où vous trouverez tous les documents sur l'année 2000 (ceux de 2001 sont sur la version UNEF RS de mars 2003, voir cette rubrique), nous vous donnons un rapide résumé des dernières années de l'UNEF, version légèrement étoffée de la contribution d'un d'entre nous à l'article de Wikipédia sur notre syndicat

Après le congrès de Toulouse (1997), très agité, l'arrivée au pouvoir de la gauche plurielle, conduisit à la cristallisation des affrontements. L’UNEF s’était prononcée en février contre la réforme Bayrou. Tandis que la direction cherchait des aspects positifs dans la politique d’Allègre, ses opposants y virent la continuation de la précédente.

Le mouvement étudiant de l’automne 1998 contre le rapport Attali et le plan U3M consacra la coupure en deux de l’UNEF, entre une direction qui refusa de s’engager, et renonça en même temps à son opposition à la réforme Bayrou, et une minorité (AGE de Rouen, Caen, Limoges, Lille, Paris IV et association de Toulouse-Mirail, rejointes ensuite par les AGE de Pau, Nantes, Paris I et Evry) qui soutint le mouvement et fit ensuite de la lutte contre ces réformes l’axe principal de son activité syndicale. Ce mouvement marqua aussi la fin d’une période, celle où congrès et Collectifs nationaux étaient dominés par les affrontements entre communistes et trotskistes : l’opposition qui se forma alors comprenait les militants de la GR (Gauche révolutionnaire scission de la LCR) qui dirigeaient les AGE de Rouen et Caen, mais aussi de nombreuses autres sensibilités, compris des communistes hostiles soit à la direction du PCF, soit seulement à la ligne syndicale de la direction de l’UNEF, et des socialistes, tandis que les militants de la LCR se retiraient progressivement de l’UNEF, beaucoup passant à SUD (Nancy, Poitiers, Reims, minorité de Paris I), certains à l’UNEF-ID (Strasbourg). Ceux qui restèrent, surtout à Jussieu, où ils dirigeaient l’AGE, et à Nanterre, où ils étaient tantôt une forte minorité, tantôt la majorité, se désintéressèrent de l’Union nationale, refusant de participer au Bureau national et étant presque systématiquement absents des Collectifs nationaux.

A partir de janvier 1999, s’ajoute à cette question celle de l’unité avec l’UNEF-ID, avancée par la direction Delpas (officiellement : pour tenter de répondre au très faible taux de syndicalisation du monde étudiant) malgré de nombreuses réticences dans sa majorité. Elle domine le 79e congrès (Pantin, avril 1999) qui, dans une grande confusion, vote à une écrasante majorité une motion "contre toute forme de réunification" (votent pour: l’opposition et la plus grande partie de la majorité, le reste s’abstenant ; seuls votent contre des délégués des deux AGE encore dirigée par des membres de la LCR (Jussieu) ou co-dirigée (Nanterre)), mais reconduit la direction sortante.

Durant ce congrès, l’AGEL (Limoges), l’AGE la plus forte de l’UNEF d’après ses résultats électoraux, annonce sa scision de l’Union nationale. Elle est rejointe ensuite par l’AGE de Pau et l’Association de Toulouse-Mirail, qui forment avec elle Solidarité étudiante.

L’UNEF sort donc de ce congrès profondément divisée. D’un côté, l’opposition, affaiblie, poursuit dans les AGE qu’elle domine la lutte contre les réformes Bayrou-Allègre et tente, en participant à l’intersyndicale "Ensemble contre les réformes Allègre", de maintenir des liens avec les scissionnistes de SE, d’en rétablir avec l’AGET-ASL, et d’en créer avec le SEUL de Montpellier. De l’autre la direction garde la perspective de l’unification avec l’UNEF-ID, alors prévue pour la fin 1999.

Les réticences des AGE de la majorité et le passage de Lyon à une opposition ouverte à l’automne condamnent ce processus. Mais la division persiste sur la question des réformes et est aggravée par le mouvement de l’Education nationale contre Allègre.

Les élections aux CROUS de mars 2000 sont un désastre pour l’UNEF (majorité comme opposition) qui ne conserve qu’une dizaine d’élus, et perd donc tout espoir de conserver son représentant au CNOUS. Une tentative de liste unitaire avec l’AGET-ASL (scission de l'UNEF Toulouse Arsenal après le 78e congrès de mai 1997) et SE, recherchant le soutien du SEUL échoue : seule l’AGET-ASL accepte, ce qui condamne la tentative, et la liste fait finalement moins de voix que le total des élus UNEF, pour des raisons restées à ce jour mystérieuses.

En juin 2000, alors que la liste pour le CNESER est prête, que l’opposition y participe et la soutient, et que l’UNEF paraît certaine d’y conserver son élu, et donc le statut d’organisation nationale représentative , Karine Delpas annonce au Bureau national à trois jours du dépôt, le vendredi 2 juin, que l’UNEF-ID propose une liste commune (avec une place éligible pour l’UNEF seulement) et qu’il faut l’accepter.

La proposition est ratifiée le lendemain par un Collectif national très peu représentatif, presque uniquement par les voix des membres du secrétariat national. Votent contre non seulement les représentants d’AGE oppositionnelles, mais aussi d’AGE qui soutenaient jusque là la majorité (Bordeaux, Orléans). En revanche, les dirigeants LCR de Jussieu et Nanterre votent pour. Olivier Ruet (Caen), Emmanuel Lyasse (Paris IV), Guirec Manceau (Évry) et Jihad Wachill (Paris I) décident alors de lancer une liste alternative et de tenter de trouver en 48 heures les 22 élus de conseils centraux de 22 établissements différents nécessaires. Ils obtiennent le soutien du SEUL et de l’AGET-ASL, mais non de SE (le dossier sur le CN et ses suites).

La liste, intitulée " Ensemble, pour une Université publique de qualité ouverte à tous. Liste de rassemblement syndical ", est finalement dirigée par Olivier Ruet et comprend des élus UNEF des AGE de l’ancienne opposition (Caen, Paris IV, Paris I, Rouen, Lille I, Lille III, Evry, Paris XII, Nantes, Dijon), d’Arras, de Lyon (Lyon I, Lyon II, INSA), une élue UNEF de Paris III et un d’Orléans à titre personnel, des élus de l’AGET-ASL (Toulouse Arsenal), de SE Pau et du SEUL (Montpellier II et III). Elle est soutenue par l’UGEM-UNEF (Montpellier II et III). Déposée incomplète le lundi 5, mais apparemment complétée dans les délais prévus par les textes, elle est déclarée invalide par le ministère (le dossier sur cette liste). La liste " unitaire " UNEF-ID/UNEF obtiendra moins de voix que le nombre d’élus revendiqués par la seule UNEF-ID.

Entretemps, d’autres AGE, dont Bordeaux, Rennes et Orléans, condamnent la décision du Collectif national.

Mais les opposants se divisent sur la suite à donner. Alors que la majorité d’entre eux veut prendre acte du rejet écrasant par l’UNEF de sa direction pour entreprendre la reconstruction du syndicat, l’AGE de Caen crée unilatéralement fin juin la FSE qui est rejointe par le SEUL, puis par l’UGED-UNEF (Dijon) et l’AGET-ASL.

La direction Delpas prévoyait de faire avaliser la dissolution de l’UNEF et le processus d’unification par un congrès en novembre, pour participer ensuite à un congrès d'unification en décembre. Elle convoque pour cela un collectif national le 23 septembre. Ses opposants exigent le report du congrès, en s'appuyant sur les délais fixés par le règlement intérieur. Le résultat du vote sur ce point est contesté. Finalement, les adversaires de la réunion quittent la salle (leur déclaration), décident de boycotter le CN suivant et de réunir une conférence nationale des AGE de l'UNEF fin octobre.

Cette conférence adopte l'appel d'Antony, mais décide finalement la participation au congrès organisé par la direction. Malgré les conditions de son organisation, le refus de l’unification (auquel se sont ralliés entre-temps les AGE de Clermont et Orsay) y est majoritaire (malgré le changement de camp du CEN-UNEF de Nantes, qui s'aligne alors sur les positions des militants LCR), et la direction doit reculer, mais refuse d’être renouvelée (le dossier sur ce congrès).

La " réunification " semble alors enterrée. Les militants LCR et leurs nouveaux amis nantais en tirent les conséquences en rejoignant l'UNEF-ID lors de son congrès d'avril 2001. Les mois qui suivent sont marqués par un effondrement de l’activité, et la quasi disparition des AGE qui avaient jusque là mené la contestation, Rouen, Paris IV et Lyon, en raison de leur incapacité à renouveler leurs directions. Au printemps, à la surprise générale, la direction Delpas relance le processus d’unification et convoque pour le 13 mai un Collectif national pour l’avaliser. Celui-ci est caractérisé par une grande confusion, de nombreuses contestations des mandats des délégués de part et d’autre, et un vote final incertain. En particulier, l'opposition dénonce l'admission avec droit de vote de délégués ayant participé au congrès de l'UNEF-ID, dont un a été élu à son BN, un autre à sa commission administrative. Mais la direction Delpas considère qu’elle y a gagné et convoque un congrès pour juin. Ce congrès, boycotté par la quasi totalité des AGE, vote la dissolution de l’UNEF et son adhésion immédiate à une fusion (sans congrès) avec l’UNEF-ID.

Mais les adhérents de l’ancienne UNEF opposés à l’unification, pour eux " la liquidation de l’UNEF dans l’UNEF-ID " ont été incapables de construire quoi que ce soit et se sont, dès le lendemain du Collectif national du 13 mai 2001, divisés en deux camps

1) Ceux qui voulaient revendiquer leur continuité avec l’UNEF, et affirmer une ligne syndicale d’opposition aux réformes de l’Université menées par Bayrou, par Allègre et Lang, qu’ils considéraient comme fidèle à ce qu’avait été l’UNEF avant 1997. C'est la position des AGE d'Évry, de Lille, d'Emmanuel Lyasse (minoritaire à Paris IV depuis avril) et, au départ, de Paris I.

2) Ceux qui voulaient créer une nouvelle organisation, admettant donc la validité de la dissolution de l’UNEF, et étaient beaucoup plus flous sur les réformes. C'est la position prise par l'UNEF Paris IV, dirigée par Philippe Lieutaud, après sa transformation en AGEPS en avril. Elle est soutenue par les AGE d'Orsay et de Paris XII.

Les AGE de Montpellier et de Lyon hésitaient. Les autres, dont Bordeaux et Clermont se désintéressèrent du débat.

L’AG extraordinaire convoquée fin juin en référence aux statuts de 1969 (La convocation envoyée par Paris I, en concurrence avec une autre de Paris IV) fut le lieu de l’affrontement entre ces deux camps, et de l'apparition d'un troisième Quand Paris I accepta de renoncer à la continuité avec l'UNEF, Évry et Lille, poussés par Emmanuel Lyasse, quittèrent la réunion (leur déclaration).

Les six autres AGE présentes, Paris IV, Paris I, Paris XII, Orsay, Lyon et Montpellier trouvèrent un compromis sur la création d’une " UNEF autrement " qui n’eut jamais la moindre existence. L'UNEF avait vécu.

Paris IV et Paris XII rejoignirent à l'automne la FSE, qu'elles quittèrent au bout d'un an pour passer à l'UNEF dite réunifiée.

L'UGEM (Montpellier) passa à SUD Étudiants au bout d'un an, après le départ d'une minorité pour la FSE.

Clermont-Ferrand avait dès juin décidé de rejoindre l'UNEF dite réunifiée.

L'AGEO (Orsay) et l'AGER (Rouen) cessèrent toute activité et disparurent, comme l'avaient déjà fait l'AGEUR (Rennes) et l'UGES (Orléans) l'année précédente.

L'UNEF Lyon, très affaiblie, devint l'USEL qui adhéra beaucoup plus tard, en 2003, à la FSE

La FAEB (Bordeaux) se transforma d'abord en Réseau B, avant de rejoindre, à la surprise générale, la FSE.

L'UNEF Paris I explosa en novembre 2001 entre partisans et adversaires de l'adhésion à la FSE. Les premiers cessèrent toute activité. Les seconds, légèrement majoritaires, créèrent Oxygène.

En janvier 2002, l’UNEF Evry, l’AGEL-UNEF (Lille), Oxygène Paris I et quelques Parisiens isolés (dont Emmanuel Lyasse et Jihad Wachill) tentèrent de créer un réseau UNEF Résistance syndicale dans la continuité de l’ancienne UNEF, en espérant rallier Lyon et Montpellier, qui refusèrent de les suivre. L’AGEL-UNEF s’effondra rapidement. Oxygène Paris I, transformé par l'arrivée de nouveaux adhérents, passa à la FSE au printemps 2003. L’UNEF Evry survécut jusqu'en 2004 comme syndicat local puis cessa à son tour toute activité quand son président Guirec Manceau, termina ses études, faute de successeur. (Pour plus de détails sur l'UNEF résistance, voir la fin de l'historique du site)

Signalons enfin qu'en 2007, l'AGE de l'actuelle UNEF de Clermont, puis celle de Paris IV, deux des rares pouvaient revendiquer une continuité avec l'UNEF dont nous vous parlons ici, ont fait scission pour reprendre leur autonomie, sous les noms d'AGEC et d'AGEPS.

 

 

 


Le site unef.org tel qu'il était en décembre 2000 (version la plus complète)

 

 


Version de juillet 2000 (tous les liens ne fonctionnent pas)

 

 


La dernière version, en mars 2003 (UNEF RS, avec tous les textes après décembre 2000)

 

 


Les archives du forum discussions@unef.org, de septembre 1999 à mai 2004

 

 


Le site officiel de l’UNEF tel qu’il est resté de 1997 à 2001

(lien externe vers le site www.archive.org)